Contribution provisoire de l'Algérie à la COP21 (analyse) #4
L'Algérie s'est engagée de plein pieds dans la consommation industrielle...elle est donc responsable et le sera d'autant plus que c'est un des plus grands marché d'Afrique...
4# Sans reponsabilité, pas d'influence...
3-Conditions nationales
Pour cette partie, nous ne choisirons qu’un seul extrait, tant il en résume parfaitement l’esprit :
« L’Algérie, est donc en droit de bénéficier de la solidarité internationale climatique découlant du futur Accord de Paris, du fait qu’elle est particulièrement vulnérable aux effets de l’accumulation des gaz à effet de serre dont elle n’est nullement responsable ni historiquement, ni présentement, ni dans le futur en raison de la prépondérance du gaz naturel dans son mix énergétique, énergie propre contrairement au charbon. Dans ce contexte les ressources prouvées et estimées de l’Algérie en matière de gaz naturel devraient pouvoir aider ses partenaires à promouvoir l’utilisation de cette source propre d’énergie. »
La troisième partie de cette contribution algérienne est donc dédiée à représenter l’Algérie comme un pays dont l’écosystème national est particulièrement affecté par de nombreuses dégradations. Jamais on n’a senti l’intelligence de ce document si prolifique à reconnaitre l’ampleur du désastre. Pourtant, la plupart de ces périls « verts », de ma propre expérience, ne semblent pas découler vraiment d’un dérèglement climatique ; mais plutôt d’une gouvernance environnementale si peu efficiente sur le terrain.
Prenons tout d’abord le cas du stress hydrique. En Algérie, est-il vraiment à incomber seulement à un déficit de pluviométrie ? Alors pourquoi toutes ces inondations également évoquées dans cet état des lieux ? N’est-il pas courant d’entendre de nombreux experts indépendants mettre ces fléaux au crédit d’un aménagement du territoire hasardeux, d’un réseau d’AEP archaïque, du gaspillage généralisé, de travaux publiques bâclés, de piètre efficacité hydrique de tout un système économique ? Quid de l’exploitation du gaz de schiste et de ses ravages plus que potentiels sur une des plus précieuses nappes phréatiques de la planète ?
Combien de milliers d’hectares de terres arables, de forêts, de couverture végétale, de montagnes couvertes d'arbes , ont été dévorés durablement pour alimenter une économie qui n’a de circulaire que sa création d'un cercle très fermé de complaisances ? Pour à présent se plaindre de la pauvreté des sols algériens? Quand certains engrais qui circulent librement dans ce pays sont de véritables poisons pour notre terre-mère l’Algérie ? Que dire des décharges sauvages, des C.E.T mal gérés, des montagnes qui s’affaissent à force d’être dénudées de leur manteau vert, celles qui disparaissent, comme Bouzegza, pour finir en gravier?
La liste des défaillances du régime environnemental algérien est trop longue pour être ici évoquée. Celles de tous les gaspillages provoqués par un mercantilisme convulsif est encore plus lourde de sens. La conclusion sera toujours la même question : qui nous dira que l’argent du fond vert ira bien vers des projets sincères, et pas seulement « pilotes » ?
Prenons le cas de ma région, Guerbes, qui abrite dans la wiliya de Skikda un espace naturel soutenu par divers organismes internationaux ainsi qu' une convention internationale (RAMSAR) qui la classe parmi les zones humides les plus précieuses d’Afrique méditerranéenne. Son complexe de zones humides est d'ailleurs considéré comme un des 25 hotspot de la biodiversité mondiale.Des centaines de milliers de dollars récoltés...Et rien...
Rien d’autre qu’une bande de fellah qui dépouillent la région de toute sa couverture végétale, détruisent une aulnaie, assèchent des lacs, les polluent parfois, empoisonnent les sols. Un désastre que tout cet argent et ces bailleurs de fonds étrangers n’ont jamais pu empêcher. Pire, malgré une lettre, ainsi que des photos envoyés au plus haut rang de la DGF, malgré des articles dans de grands quotidiens, ces déforesteurs avérés et identifiés agissent dans la plus totale impunité...Que vient faire le carbone dans tout cela ? Ai-je besoin de citer d’autres exemples, parmi les myriades que j’ai pu identifier lors de mes nombreuses enquêtes en Algérie ?
Je me dois de revenir à l’essentiel de cet article, à présent que ces questions ont été posées. D’autres me viennent déjà à l’esprit quand je lis autant de mauvaise foi concernant la responsabilité soit disant si piètre de notre pays en matière de gaz à effet de serre. J’ai beau être patriote, je ne saurais d’autant plus soutenir un langage indigne de mes ancêtres qui ont toujours été responsables de leurs actes. Car prôner que l’on n’est pas responsable, c’est également accepter d’être un dominé. A tout pouvoir, qui plus est souverain, il incombe le poids de la responsabilité.
Certes, « historiquement » l’Algérie n’est entré que très tardivement dans une phase industrielle ; tellement qu’elle n’a toujours pas de véritable industrie. Mais, cependant, depuis 1962, notre pays importe progressivement des produits et des services qu’il aurait pu produire localement, avec une meilleure vision économique. Tout cela a généré des émissions considérables de GES pour leurs pays fournisseurs ainsi que le transport de ces produits. Cette tendance n’a fait que s’accentuer, puisqu'aujourd'hui 'Algérie importe quasiment tout ce qu'elle consomme depuis le mandat du Présient Chadli. L'économie de l'Algérie pèse donc sur les émissions globales depuis au moins le début des négociations climatiques, c'est à dire en 1992. Cela n'est rien comparé aux pays qui se sont engagés dans l'ère industrielle dès la fin du 19ème siècle, certes.Mais cet écart va-t-il perdurer au regard de la mauvaise gestion environnementale du pays?
On doit cependant, à la décharge de l'Algérie, aborder le fait que la France a détruit un cinquième de ses forets...Cette responsabilité là est bien historique, et elle devrait être compensée. En adoptant une attitude responsable, mais aussi en réalisant le poids de ses émissions virtuelles , elle pourrait de ce fait exiger d'autres pays une attitude aussi juste....
Être une nation responsable serait de l’admettre.D'autant que, pour l'instant, cette responsabilité n'a été vraiment contraignante pour personne. Au présent, et encore plus à l’avenir cette responsabilité est loin d'être nulle dans ce domaine. Un des plus gros consommateurs et importateurs d’Afrique doit péser de tout son poids dans la balance du régime climatique mondial. Et non demander l'aumône. Cette posture responsable aurait pu faire de l'Algérie un vrai leader climatique africain. L'Algérie ne produit pas grand chose, certes, mais consomme de tout et de plus en plus. Bien entendu, il ne s'agit pas de se comparer à l'Afrique du Sud en matière d'émission ni d'ailleurs de développement économique. Mais l'Algérie, c'est tout de même un des niveaux de vies plus élévés d'Afrique...et donc de consommation...et forcément d'émissions GES ; où qu'elles se produisent sur la planète...
Assumer cette responsabilité, ce serait faire acte de peser sur les négociations climatiques mondiales, prendre la posture d’un acteur, et non celle d’un spectateur, aussi volontaire soit-il à participer en coulisse au bon déroulé de la pièce . C’est justement éviter le piège, il me semble, dans lequel notre pays ne devrait pas tomber. Celui d'incarner le bon brave qui n’a pas encore conscience de la portée de ses actes. Juste bon à quémander quelques millions de dollars chaque année. Et encore ... faut-il que ce fameux fond vert de 100 milliards de dollars annuels (à partir de 2020) soit enfin alimenté de manière conséquente ! Au lieu de prendre la posture d'un pays responsable et conscient de sa vraie place sur l'échiquier climatique international.
Nous de devons pas attendre de potentiels financements étrangers ou bien un éventuel accord multilatéral pour nous engager de plein pied dans ce défi majeur. Ce qui ne veut pas dire à l'aveuglette. Il nous faut une vision, un projet de société, à la fois endémique et capable de s'inscrire dans une gouvernance planétaire, multlatérale. Et non subir le contraire.La contibution algérienne ne fait que reprendre points par points les objectifs de la Convention Climat; sans vraiment proposer quelque chose d'original. Non parce qu'il faut l'être à tout prix, mais bien parce que, il me semble, l'Algérie ne pourra résoudre ses défis climatiques , à l'échelle nationale, avec seulement des mesures globales. De plus, cela aurait été une bonne occasion de retrouver les chemins de l'avant-garde algérienne ainsi que la voie d'une jeune nation révolutionnaire non alignée; deux vertues algériennes trop vite oubliées ou confisquées...
Le débat sur le climat est avant tout un exercice de gouvernance mondiale. Son histoire prouve que le climat et l'environnement ne sont que des prétextes pour débattre mondialement de radicaux communs. Celles et ceux qui ne l’auraient pas encore deviné, doivent impérativement se documenter sur le sujet, prendre le temps d’en cerner la chronologie et donc les étapes les plus charnières. Chaque pays qui participera à la COP21, se positionnera dans un nouvel équilibre des forces mondiales dont l’écologisme, c’est-à-dire la politique justifiée par la science écologie, détermine de plus en plus le cadre. Si l’Algérie joue la carte de l’irresponsabilité climatique, du manque de vision régionale (omettre de créer le régime climatique maghrébin) alors elle jouera le rôle d’un petit pays...aussi vaste soient ses frontières et ses potentiels gâchés...
Certes, le Maghreb est plus une idée qu'une réalité; faite de blocages réels et apparemment persistants. Mais qui mieux que l'Algérie pourrait à présent contribuer à les dépasser mutuellement? En oeuvrant à faire de cette région , un bloc régional, avec une politique climatique cohérente, l'Algérie aurait pu accentuer son aura africaine et non l'étioler pour briller aux yeux de l'Europe climatique qui, elle, influe beaucoup sur la vision algérienne du climat, mais aussi de l'environnement. L'Algérie est orpheline d'une écologie algérienne, elle cultive plutôt l'écologie en Algérie...
La responsabilité, pour l'Algérie serait, par exemple, de produire elle-même des produits ainsi que des services estampillés "éco"; imposer aux pays importateurs de lui fournir des produits "faibles" en émissions carbone ou tout autre GES.Exiger la qualité environnementale à ses partenaires et non la quantité de fonds verts. Ce serait aussi investir de manière significative dans la recherche environnementale, inspirer l'université à l'innovation, investir dans une éducation environnementale algérienne et non celle que l'ONU et les autres grands bailleurs de fonds sociaux internationaux imposent à nos associations. Elles dépendent aujourd'hui largement de ces financements étrangers...
Enfin, pour en revenir au texte, l’utilisation de la formule « source propre d’énergie » au lieu de « source d’énergie propre » me parait fort étrange. Une « source propre d’énergie » signifierait certes que les moyens pour l’obtenir seront « propres » ; ce qui n’est pas forcément un facteur du respect de l’environnement. Quand on sait tous les produits chimiques nécessaires à la propreté d’un site industriel, ou bien seulement à une ménagère algérienne pour tenir convenablement la propreté de son foyer...
A moins que "source" ne prenne ici son sens dans la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques:
" On entend par "source" tout processus ou activité qui libère dans l'atmosphère un gaz à effet de serre, un aérosol ou un précurseur de gaz à effet de serre. " (Article 1, al.9). Ainsi "propre" pourrait signifier quantité "convenable" d'émissions de GES pour produire de l'énergie.
Ou bien serait-ce aussi une façon d'évoquer en demi teinte l'exploitation du gaz de schiste? En institant sur le caractère "propre" et donc maîtrisé de cette entreprise en Algérie? Mais a-t-elle été vraiment "propre" d'un point de vue démocratique?
En tout cas, si cette tournure est juste maladroite, elle est également sujette à certaines mauvaises interprétations. Car, elle peut aussi laisser penser que le gaz naturel en question sera « propre » (au sens d’appartenir); sera-t-il propre aux Algériens ou bien à ces « partenaires » de l’Algérie?
L'Algérie évoque d'ailleurs, dans sa contribution, le fait qu'elle pourra fournir en gaz naturel les mix energétiques "décarbonés" de ces derniers. Ainsi, elle participera également aux éfforts globaux de réduction de gaz à effet de serre....Mais cela sera-t-il au prix d'exploiter du gaz de schiste? Sera-t-elle compétitive face à une offre en plein boum? Ce gaz ne doit-il pas servir à la transition économique algérienne d'un système rentier à un écosystème dynamique et diversifié.
A lire ce volet de la contribution, on dirait presque que l'Algérie qui l'a rédigée n'est responsable de rien et s'en remet presque totalement à la solidarité internationale pour assumer ses erreurs nationales en matière de gestion environnementale. Comme si le ciel avait vraiment quelque chose à voir avec tout cela...
A suivre...
Annexe:
Les entreprises pétrolières et gazières ont pris le contrôle des lobbies européens des énergies renouvelables. La française Total, aux côtés de consoeurs comme Iberdrola (Espagne), E.On (Allemagne) et Enel (Italie-Espagne), forment désormais la majorité du conseil d’administration des deux principales associations professionnelles de l’éolien et du solaire. Cette prise de contrôle vise à freiner la transition énergétique au niveau européen, en particulier en faisant la promotion du gaz comme « énergie de transition ».
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